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Les Potes à Tatave
Les Potes à Tatave
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16 avril 2009

Mais qui est Tatave?!? Message anti Spleen

Tatave se frotta la joue avec la paume de la main et sentit la barbe naissante qui lui envahissait le visage.

Quinze heures !

Etait-ce une heure bien raisonnable pour sortir du pieu et s’attaquer au petit déjeuner.

Le spectacle de désolation qu’il aperçu en entrant dans la cuisine le stoppa net dans son envie de café. L’évier débordait sous la vaisselle de la semaine, les plats et les assiettes encore remplis de reste de nourriture, entassés là au fil des jours dans l’attente d’un hypothétique rinçage que Tatave remettait toujours au lendemain.

Il ne changeait ses habitudes que les jours où il avait programmé de ramener dans son deux pièces de célibataires une de ses habituelles conquêtes aux yeux las et aux seins lourds dont il faisait son ordinaire depuis qu’il vivait dans ce trou à rats.

En guise de café, Tatave se serait bien contenté d’un ou deux comprimés d’aspirine pour faire passer la gueule de bois, mais un rapide coup d’œil sur les étagères, lui confirma qu’il était en rupture de stock depuis au moins trois semaines.

Toujours pareil avec l’aspirine !

Quand t’en cherches, il y en a pas, tu te dis que dès que tu mettras le nez dehors, tu iras en acheter et puis tu oublies…jusqu’à la prochaine gueule de bois.

Et pour tout arranger, plus de clopes.

Tatave se pencha sur la table de salon où des cendriers pleins débordaient des mégots fumés la veille et trouva un cadavre de joint qu’il s’enquit de devoir rallumer.

Il manqua de se cramer le nez avec la flamme du briquet en rallumant le bodo qui aussitôt s’enflamma et s’effondra en cendres sur son t-shirt. Il eut le réflexe de chasser les étincelles d’un revers de la main pour ne pas se transformer en torche mais son geste fut fatal pour la moquette qui n’était plus à un trou de cigarette près.

Il n’avait jamais su rouler et ses pétards ressemblaient aux carottes toutes biscornues qu’on trouve à Toulouse sur le marché Saint Aubin. Il s’en foutait, il n’achetait jamais de shit, se contentant de tirer sur les pétards des visiteurs d’un soir qui finissaient leurs virées nocturnes chez lui car ils étaient quasiment certains d’y trouver une bouteille de vieux rhum ou de Ricard.

La soirée précédente n’avait pas failli à la tradition.

Il avait ramené un aréopage de potes à deux heures du matin, tous bien allumés et imbibés, qui avaient entrepris de démolir méthodiquement ce qui restait de son salon et de sa cuisine.

Il sentait maintenant les coliques lui vriller le bide comme tous les lendemains de teuf, mais il appréhendait encore plus de pénétrer les toilettes que son ami Kader avait retapissé de vomi avant de s’écrouler sur un canapé et de ronfler jusqu’à ce qu’il le vire à l’aube, avec le reste de la troupe.

Au prix d’un effort surhumain, Tatave venait d’extirper une casserole qu’il passa sous le robinet pour décoller le reste de pates attachées au fond. Il allait pouvoir se faire un Nes, ça irait mieux après.

Fallait-il encore trouver une tasse et une cuiller.

Il se contenta d’un verre Duralex qui n’avait pas servi.

Il aimait bien boire le café dans un verre, ça lui rappelait son enfance quand il habitait aux Quatre Chemins, au dessus de la mère Denise, une matrone aux cheveux roses qui passait ses journées en combinaison de nylon et en robe de chambre et qui engueulait toujours son chat.

Tatave remuait bruyamment sa cuiller dans le breuvage marron foncé afin de bien mélanger le café au sucre en poudre.

Il s’était fait une petite place sur la table de salon au milieu des CD, des magazines, des cendriers, des restes da cacahuettes, d’olives et des cadavres de bouteilles.

Il essayait de ne pas penser à tout ce qu’il devait faire : débarrasser, nettoyer, passer l’éponge, faire cette putain de vaisselle, vider les poubelles et passer un coup d’aspirateur.

Il en avait bien pour trois heures.

Après, il irait prendre un bain bien chaud avec de la mousse.

Et puis, il se ferait un petit repas de célibataire avant le film du dimanche soir.

De toute façon, il n’y a rien à faire à Paris, le dimanche.

Et puis, il ne fait pas beau, ça fait deux semaines qu’il pleut, ça ne donne pas envie de sortir.

Tatave sentit soudain l’envie irrésistible de savoir ce qu’il allait regarder à la télé ce soir.

Un rapide coup d’œil au magazine télé qui trainait par terre, ouvert à la page des mots croisés, et son choix fut vite fait.

Un film avec Jugnot, c’est parfait pour un dimanche.

Il se dit alors qu’il serait peut-être temps d’ouvrir une fenêtre et d’aérer la pièce, ça sentait le fauve chez lui.

Rien ne l’obligeait à faire du ménage avant de prendre un bain après tout.

Il était seul maître à bord.

Personne pour lui dicter des ordres, ni parents, ni épouse, ni enfants.

La liberté totale.

Cette pensée lui fila la trique.

Il se dirigea vers la salle de bain, pensa à placer la bonde, ouvrit le robinet d’eau chaude et vida le bain moussant dans la baignoire.

En se relevant, il croisa son reflet dans la glace.

Il se sourit, se fit une grimace et ne put réprimer un pet sonore.

Quelle belle vie quand même !

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